PRESENTATION

Les enfants semblent être les grands oubliés de la ville. C’est tout au moins ce qu’a été amené à conclure le philosophe de l’urbain, Thierry Paquot, au terme d’une série de trois années de conférences organisées à Dunkerque portant sur la place des enfants dans la ville en 2015. Ce cycle de conférences a conduit à une exposition à la Halle au Sucre de Dunkerque et à la publication d’un ouvrage, La Ville récréative (2015). La même année, la revue en ligne Métropolitiques consacra un numéro entier aux enfants dans la ville. Le numéro est dirigé par deux sociologues, Carole Gayet-Viaud et Clément Rivière, et un philosophe de la ville et de l’architecture, Philippe Simay. Le constat est le même : « les études urbaines se sont encore peu intéressées aux enfants ». Pourtant, en 1991, la ville de Fano, au centre de l’Italie, entreprend de créer un laboratoire nommé « La Ville des Enfants » dont les travaux se veulent être une référence pour les urbanistes, les associations, les élus et les enfants. L’expérience est initiée et conduite par le psychopédagogue, Francesco Tonucci
De manière plus générale, les enfants ont longtemps été marginalisés dans les études anthropologiques, sociologiques et géographiques. Pourtant, comme le souligne l’anthropologue Lawrence A. Hirschfield, « les enfants sont particulièrement doués pour acquérir la culture des adultes et moins doué pour créer leur propre culture » (Hirschfield, 2002). Ils acquièrent très rapidement et très scrupuleusement la faculté de s’adapter aux modes culturels qui les entourent. Judith Harris, en 1998, revendique certains droits que l’enfant possède de facto sur son environnement. Elle écrit : « A Child’s goal is not to become a successful adult, any more than a prisoner’s goal is to become a successful guard. A Child’s goal is to be a successful child… Children are not incompetent members of adult’s society; they are competent members of their own society, which has its own standards and its own culture» (Harris, 1998).
Dans La Forme d’une ville, Julien Gracq exprime combien d’avoir grandi derrière les murs d’un pensionnat situé en plein cœur de Nantes l’avait, écrit-il, « formé, c’est-à-dire en partie incité, en partie contraint à voir le monde imaginaire, auquel je m’éveillais par mes lectures, à travers le prisme déformant qu’elle interposait entre lui et moi. […] Une ville qui vous reste ainsi longtemps à-demi interdite finit par symboliser l’espace même de la liberté. »
Les sciences s’intéressant aux objets culturels de l’enfance, qui travaillent depuis plus longtemps sur les jouets, la littérature de jeunesse, les dessins animés et autres jeux vidéo, semblent travailler de manière isolée. L’un des principaux objectifs de ce colloque serait de se faire rencontrer les sciences sociales et les sciences de l’image et du texte. La ville serait alors abordée comme un espace bâti, vécu et raconté, reprenant à quelques mots près les termes du discours de Heidegger à Darmstadt en 1951, Bâtir Habiter Penser.

 

Contact : Christophe Meunier (christophe.meunier@univ-tours.fr)

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